& les Chroniques
Express
Bank Myna
"Volaverunt"

"Volaverunt"
par Bertrand Hamonou
DATES | Sorti le 25 février 2022 | Publié le jeudi 7 avril 2022
ET ALORS | Un album qui paraît simultanément sur cinq labels différents, en voilà situation inédite et réservée à "Volaverunt", le premier album de la formation française Bank Myna, dont le nom est celui, en anglais, d’un oiseau : le Martin des berges. Dès lors, il n’est pas étonnant de découvrir un chant féminin et franchement assuré, qui s’élève gracieusement au dessus des déchaînements orchestrés de "Volaverunt", sur ce post-rock tour à tour expérimental, sacré puis mécanique. Mystérieuse et puissante, la musique de Bank Myna possède un avantage irrésistible : cette voix dont l’apparente fragilité rivalise avec la pression de ce monolithe de cinq titres enchaînés qui composent un disque fascinant, encadré par l’interventions de cloches qui sonnent au début et à la fin, suggérant le passage d’un rite initiatique. Les intonations et le timbre de Maud Harribey font penser ici ou là à ceux de Lisa Gerrard, entrainés par une basse qui laboure tout sur son passage. Mariant avec audace dream pop, drone et post-rock expérimental, "Volaverunt" se révèle être un disque mystérieux et vraiment à part, d’une élégance et d’une puissance rares, pour lequel il fallait bien les efforts conjugués de cinq labels pour briller dans toute sa splendeur.

Lisa Gerrard & Jules Maxwell
"Burn"

"Burn"
DATES | sorti le 7 mai 2021 | Publié le lundi 12 juillet 2021
ET ALORS | La pochette pourrait faire penser à celle de la bande originale d’un documentaire animalier ou d’un film, un exercice auquel Lisa Gerrard se plie régulièrement depuis plus de vingt ans, il n’y a cependant pas de connexion au septième art ici. "Burn" est bel et bien le nouvel album studio de Lisa Gerrard, cette fois épaulée par le compositeur Jules Maxwell, également claviériste de de Dead Can Dance en live. Ce nouveau disque rappelle justement le groupe avec son brassage occasionnel de voix, féminine et masculine, Jules Maxwell remplaçant honorablement Brendan Perry à ce poste. Trois ans après "Dionysus", disque franchement raté auquel la chanteuse s’était associée à contre-coeur, "Burn" est une très belle revanche. Électronica et world music se mêlent avec extrême justesse, le disque s’affirme au fil des écoutes clairement plus accessible que les précédents opus de l’Australienne, trop souvent versés dans le sacré. Si la moitié des chansons possède malgré tout cette emphase propre aux génériques de fin, les mélodies sont bien plus aériennes que plombées, et avec ses belles percussions, "Burn" est sans conteste l’album le plus chaleureux et le plus lumineux de la discographie de Lisa Gerrard. À ne surtout pas manquer.

Onoda
"Land/Islands"

"Land/Islands"
DATES | Sorti le 9 octobre 2020 | Publié le jeudi 26 novembre 2020
ET ALORS | Quelle claque ! "Land/Islands" est le tout premier album du groupe français Onoda, et pourtant, il fait déjà preuve d’une audacieuse maturité. Et de la maturité, il en aura fallu pour laisser ces cinq longs morceaux de six à dix minutes chacun progresser à un rythme tout autant serein que martial. Quitte à doubler le nombre de mesures afin d’atteindre un idéal sonique époustouflant soutenu par des boucles répétitives et emmené par une rythmique qui vrombit comme le moteur d’une mécanique qu’il faudrait sans cesse alimenter. Passées leurs intros inquiétantes et tendues, les chansons montent en puissance, mues par une batterie intraitable et des boucles qui tournent, retournent et permettent aux refrains de s’introduire dans la tête jusqu’à l’ivresse. On pense à une version noisy pop aux accents krautrock du "Data Mirage Tangram" des Young Gods, avec cette idée commune du travail sur le son au coeur même des compositions, pour un résultat extrêmement dense et d’une richesse incroyable. Une telle réussite n’arrive pas par accident : il y a forcément une sacrée dose de talent là-dessous.

M.Bryo & D.M.T.
"Things I Was Due to Forget"

"Things I Was Due to Forget"
DATES | Sorti en décembre 2018 | Publié le lundi 8 avril 2019
ET ALORS | Le Belge Mark Burghgraeve a formé le projet projet électro-cold expérimental M.Bryo & D.M.T. à la fin des années 1970 avec quelques camarades étudiants. Entre 1982 et 1984, il écume les clubs et autres centres culturels, et fonde dans le même temps le fameux Klinik avec Marc Verhaeghen ! Le label lillois Nuit et Brouillard a eu la merveilleuse idée de compiler des morceaux apparus depuis 1979. Tour à tour ludiques, sautillantes, glaciales ou sombrement mystérieuses, ces diverses ritournelles au son analogique si ensorcelant, instrumentales ou non, sont certes d’une naïve simplicité, mais souvent dotées d’une grâce absolue. Les titres chantés, de manière nonchalante ou enjouée, sont des must pour qui écoute toujours Ptôse, Nihiltronix, Das Kabinette ou bien sûr Klinik et Somnambulist. Enfin, ils combleront tous les amateurs de minimal wave et autres fans du label Wierd Records.

Fatamorgana
"Terra Alta"

"Terra Alta"
DATES | Sorti le 20 février 2019 | Publié le mardi 2 avril 2019
ET ALORS | Étonnant ce son. Ces synthés. Cette ambiance. Cette voix. Cette langue. Anna Proniewska et Louis Harding sont originaires de Barcelone et parviennent, équipée d’une boîte à rythme toute simple et d’un synthé aux sonorités en apparence basiques, pour le moins vintage, à créer à travers les 11 titres de "Terra Alta" un univers assez fascinant. Si la voix froide d’Anna et ce léger écho qui agit comme un exhausteur sont en grande partie à l’origine de l’addiction que l’on peut avoir à l’album dès la première écoute, ce sont tout autant les mélodies diablement efficaces et la construction plutôt intelligente de ces compositions qui en sont responsables. On pense en vrac à Fad Gadget, un early Depeche Mode, Visage, Human League… Un disque magique qui ferait très bonne figure au catalogue du label BOREDOMproduct.

Yasuaki Shimizu
"Dementos"

"Dementos"
DATES | Réédité le 16 janvier 2019 | Publié le mercredi 30 janvier 2019
POURQUOI | Orchestration sophistiquée | Remasterisation | Inventions sonores et textuelles | Pochette
ET ALORS | Les adeptes de japonisme connaissent déjà Yasuaki Shimizu par le biais de ses compositions électroniques dans le domaine publicitaire. D’autres l’ont sans doute découvert en tant que saxophoniste expérimental. Voici la réédition de "Dementos" (1988) qui nous éclaire un peu plus sur la facette pseudo accessible de l’artiste. Il se révèle ici en véritable crooner qui malaxe des sonorités techno funk new-yorkaises avec des percussions indiennes, triturant des phrasés mandingues avec des inventions de langages dans un creuset de world music précieuse telle que la pratiquait Ryuichi Sakamoto avec son ensemble Neo Geo. Élégantes, exotiques et raffinées, ses pop songs se savourent sans modération aux côtés d’autres miniatures de David Byrne, David Sylvian ou Masami Tsuchiya dont le timbre de voix se rapproche beaucoup.
